Cher ami,
Le biochimiste néerlandais Cees Vermeer a le mérite de mettre les pieds dans le plat.
Après avoir étudié la population néerlandaise pendant 40 ans, il est arrivé à cette conclusion :
« Une carence en vitamine K est dangereuse, voire aussi nocive que de fumer deux paquets de cigarettes par jour[1]».
Et pour cause, si vous en manquez (comme 1 Hollandais sur 3 !),
> vos vaisseaux sanguins sont moins élastiques,
> vous risquez des problèmes de coagulation sanguine,
> mais aussi de faire de l’ostéoporose…
En réalité, la vitamine K a deux formes : la K1 et la K2.
? La K1 est celle de la coagulation (son nom allemand est même Koagulationsvitamin). C’est elle qu’on injecte aux nouveau-nés pour éviter les troubles de la coagulation (le lait maternel n’en contient pas). Elle est synthétisée par les plantes.
? La K2 joue un rôle majeur contre les affections ostéo-articulaires, mais aussi contre la démence. Elle est elle, synthétisée par notre flore intestinale.
Surtout, sans vitamine K, vous doublez votre risque de perdre votre mobilité et votre autonomie par rapport à ceux qui ont des niveaux suffisants[2]…
… et vous augmentez votre risque de cancer (carence de 25 % en vitamine K = risque de cancer augmenté de 25 %[3]), car la vitamine K inhiberait aussi la croissance des cellules cancéreuses. Raison de plus pour surveiller votre taux !
N’en manquez pas !
Les aliments les plus riches en K1 : épinards (1 poignée d’épinards crus = 181 % des apports journaliers), salade verte, les différents choux, brocolis, asperges, mais aussi les huiles de soja et de colza, sans oublier les algues.
Pour la K2 : les foies d’animaux et les fromages, mais surtout les aliments fermentés comme le miso, la choucroute, le natto, car la K2 est synthétisée par votre microbiote !
Attention : Si vous êtes sous anticoagulants de la classe « antivitamines-K », limitez vos apports en vitamines K (une portion par jour).
On se supplémente ? Il n’existe pas de supplémentation en K1 (sauf pour les nouveau-nés). En revanche, la K2 peut être intéressante contre l’ostéoporose, en cas de caries fréquentes, en prévention de maladies cardiovasculaires ou neurodégénératives… et de cancer.
Signes de carence ? Des bleus fréquents, des saignements de nez, des selles noir foncé ou encore de l’ostéoporose.
À 17 ans, il perd la vue à cause d’une « simple » carence !
Cet adolescent britannique consulte son médecin pour une fatigue chronique. À première vue, il ne souffre pas de malnutrition, ni de carences particulières à part en B12.
Pourtant, sa vue baisse de façon spectaculaire, sans raison apparente.
L’IRM révèle une perte des fibres nerveuses de la rétine, mais aucune compression, ni d’inflammation.
Il fallait donc regarder ailleurs…
… notamment dans son assiette !
Car, depuis l’école primaire, il refusait de manger des fruits, des légumes, et se « nourrissait » de pain blanc, de saucisses et d’aliments transformés.
Sa carence grave en vitamine A aurait donc provoqué une soudaine neuropathie optique « nutritionnelle »[4]. (Sans surprise, il manquait aussi de vitamines D et B, de cuivre et de sélénium).
Pourtant, son cas n’est pas si rare : chaque année, 500 000 enfants dans le monde deviennent aveugles à cause d’une carence en vitamine A[5] !
Pas étonnant que la vraie vitamine A s’appelle… rétinol !
Au quotidien, ouvrez l’œil sur les précurseurs de la vitamine A, les « provitamines A » (caroténoïdes) : votre foie en a besoin pour fabriquer ce précieux rétinol !
Mais attention à ne pas confondre la vitamine A avec le bêta-carotène : c’est un provitamine A parmi d’autres, comme l’alpha-carotène, la lutéine, la zéaxanthine ou encore le lycopène (intéressant si vous avez des problèmes de prostate).
N’en manquez pas !
Pour la vitamine A : huile de foie de poisson, et principalement de morue, foie de veau, beurre, jaune d’oeuf, fromages gras…
Pour les caroténoïdes : tous les végétaux colorés, surtout rouge, orange et vert (la chlorophylle masque leur couleur orangée). Plein feu sur les piments, poivrons, carottes, potiron, maïs, abricots, mangue, pastèque, pêche, épinard, brocolis, tomates…
On se supplémente ? Si vous avez des problèmes de vue, si vous avez plus de 60 ans pour prévenir le vieillissement cutané et certains cancers (privilégiez les caroténoïdes).
Signes de carence : atteintes de la cornée ou rétine, une peau sèche, des infections fréquentes.
Attention : Ne prenez jamais de bêta-carotène seul, ni de synthèse, car tout seul, il a un effet… pro-inflammatoire et pro-tumoral ! Choisissez des produits avec tous les caroténoïdes !
Du Facteur X à la vitamine E : quelques milligrammes de santé
En 1922, deux chercheurs Evans et Bishop, découvrent que la laitue et le germe de blé contiennent un facteur qui semble essentiel à la reproduction des rats.
Ils lui donnent le nom de « facteur X ».
En réalité, ils venaient de mettre le doigt sur la vitamine E – même si elle comprend 8 molécules différentes et complémentaires : les tocophérols (alpha, bêta, gamma et delta) ainsi que les tocotriénols (alpha, bêta, gamma et delta).
Pourtant, cette grande famille est loin de se limiter à notre fertilité, car elle constitue de merveilleux anti-oxydants.
Elle empêche notamment les acides gras essentiels et les vitamines C et A, de s’oxyder.
En prime, elle aurait une influence protectrice sur notre cerveau en retardant la perte cognitive. (Elle préserve la membrane cellulaire de nos neurones et évite donc leur mort.)
Ainsi, même s’il en faut très peu, elle est hautement importante pour votre système cardiovasculaire et l’équilibre de votre cholestérol (elle régule favorablement l’équilibre entre oméga-6 et oméga-3).
N’en manquez pas !
La vitamine E se trouve dans les aliments lipidiques, comme l’huile de germe de blé, toutes les huiles de première pression à froid, mais aussi les avocats, les petits poissons gras ou encore les oléagineux. Et plus étonnamment dans les asperges, le fenouil et les épinards !
À retenir : Attention, trop de vitamine E est absolument à proscrire, car elle devient alors pro-oxydante. Veillez donc à ce qu’elle soit naturelle, et non synthétique, et ne dépassez pas les doses contenues dans les bon multivitamines, sauf avis médical.
Signe de carence : elle reste rare, avec des symptômes très peu spécifiques. En revanche, si vous en manquez, peu à peu, vous risquez de voir apparaître des maladies dégénératives.
Pour terminer cette lettre, avez-vous trouvé la 4e vitamine dont je veux parler – et leur point commun ?
La vitamine du scanDale : vous avez trouvé ?
Regardez bien cette carte car elle contient un sérieux paradoxe :
Un seul pays en Europe, en vert, possède un taux supérieur à 75 nmol/L chez les adultes : la Suède.
Étrange car cette vitamine est synthétisée par notre peau, à partir d’un dérivé du cholestérol et sous l’effet des rayons ultraviolets du soleil.
Imaginez la sacrée longueur d’avance que les Suédois prennent pour leur santé !
Car cette vitamine est tout simplement extraordinaire (faute de place, je ne sélectionne que quelques bienfaits)
- essentielle pour les os, et l’absorption du calcium ;
- contre l’ostéoporose,
- réduit le risque cardiovasculaire,
- agit sur l’immunité et prévient les infections hivernales,
- réduit le risque de maladie auto-immune,
- prévient Alzheimer, le diabète et la fibromyalgie…
Mais le plus effarant, c’est qu’elle pourrait éviter plus de 130 000 décès par cancer dans toute l’Europe, chaque année ! Soit environ 9 % de tous les décès par an en Europe[6] !
C’est énorme !
Ce n’est pas moi qui l’affirme, mais le Centre allemand de recherche sur le cancer (DKFZ), en juillet 2022.
Il suffirait donc d’une politique simple de santé publique en France : la même que celle mise en place en Suède depuis des décennies !
À l’heure actuelle, les pays qui la pratiquent auraient déjà « sauvé » près de 27 000 personnes du cancer !
Imaginez !
Cette mesure toute simple et très peu coûteuse, qui pourrait sauver tant de vies et améliorer considérablement votre santé quotidienne, c’est : l’enrichissement des aliments en vitamine D.
Rien qu’en administrant cette vitamine aux enfants (et en les exposant au soleil), on a fait disparaître le rachitisme.
Et si on caressait l’espoir de faire reculer le cancer – même un tant soit peu ?
Mon ami Xavier Bazin a récemment publié une enquête fracassante sur les raisons de ce scandale de la vitamine D, à lire ici.
Car, malgré toutes les preuves scientifiques, la France ne recommande toujours pas la supplémentation en vitamine D à la population générale[7]…
… alors de là à enrichir nos aliments… vous imaginez bien !
N’en manquez pas !
Peu d’aliments en contiennent, mais consommez régulièrement du beurre cru, du jaune d’oeuf, des poissons gras, du foie de veau, et, bien sûr, la fameuse huile de foie de morue. La principale source de vitamine D reste sa synthèse au niveau de la peau grâce au soleil, à raison d’environ 12 minutes, sans protection[8].
On se supplémente ?
Je vous recommande donc de vous supplémenter quotidiennement en vitamine D (et non en ampoules mensuelles). Vos besoins se situent généralement entre 2000 et 5000 UI/jour.
Signes de carence : douleurs osseuses, fatigue, troubles de l’humeur, infections à répétition…
Avez-vous trouvé le point commun de ces 4 vitamines : A-D-E-K ?
Bravo : elles sont toutes liposolubles !
Cela signifie qu’elles ne sont pas éliminées par l’eau dans les urines, mais dans les graisses.
Elles présentent donc un risque d’accumulation dans le corps, notamment dans le foie.
Ce n’est donc pas parce qu’elles sont essentielles pour votre santé qu’il faut les prendre en excès. En cas de doute, réalisez un bilan vitaminique et parlez-en avec votre médecin traitant.
Dans une prochaine lettre, je vous parlerai donc des autres vitamines hydrosolubles, qui sont elles aussi passionnantes !
Une preuve de plus qu’en santé, tout est vraiment question d’équilibre !
Catherine Lesage
