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Les médecins ont un métier horriblement compliqué… et mieux vaut en être conscient !

Il faut se mettre à leur place, au moins l’espace d’un instant.

Car je suis persuadé que vous serez mieux soigné si vous réalisez ce à quoi ils sont confrontés tous les jours.

Votre santé sera mieux préservée si vous apprenez à reconnaître les dilemmes cornéliens qui tourmentent votre médecin au quotidien.

Je n’exagère pas. Je sais bien que j’ai été très critique vis-à-vis de certains médecins « maltraitants » dans un article précédent.

Mais vous avez aussi le devoir d’être lucide sur ce que votre médecin peut vraiment faire pour vous. Vous devez l’aider à vous aider, sans demander l’impossible.

Votre médecin est un être humain, avec ses failles inévitables : ce n’est pas un super héros.

Et la médecine est un art tout sauf infaillible : il n’a donc pas de superpouvoirs.

Voyez plutôt les dilemmes difficiles auxquels il est confronté :

Dilemme n° 1 : doit-il vous cacher les effets secondaires des médicaments ?

Cela vous paraît peut-être évident… Votre médecin vous doit la vérité, toute la vérité.

Lorsqu’il vous prescrit un médicament, votre médecin devrait donc vous faire un exposé détaillé des risques auxquels vous vous exposez.

Mais ce n’est pas si simple, malheureusement.

Ce qui complique tout, c’est l’effet « nocebo ».

Vous connaissez son « frère jumeau », l’effet placebo : si l’on vous donne une pilule contenant de l’eau en vous disant que c’est un médicament antidouleur, vous allez réellement ressentir une diminution de votre douleur.

C’est une sorte de petit miracle créé par votre cerveau : lorsqu’il anticipe que votre corps va aller mieux (grâce à la pilule qu’on vous donne), il active des substances qui vous aident naturellement à aller mieux.

C’est la raison pour laquelle les scientifiques réalisent toujours des tests « contre placebo ».

Ils comparent toujours l’efficacité d’un remède à celle d’une pilule vide, pour être sûr que le remède a bien une efficacité par lui-même, en plus de son effet placebo.

Problème : ce qui est vrai pour les remèdes l’est aussi pour les… poisons !

Si on vous dit par avance qu’une substance va vous faire du mal… eh bien vous avez plus de chance d’avoir mal que si l’on ne vous dit rien : c’est l’effet nocebo.

Prenez cette étude spectaculaire, réalisée auprès de 13 enfants hautement allergiques au sumac vénéneux (une plante sauvage). [1]

Les chercheurs ont frotté l’avant-bras de chaque enfant avec une feuille de sumac vénéneux… en leur disant que c’était une feuille inoffensive.

Aussitôt après, ils ont frotté l’autre avant-bras avec une feuille inoffensive… en leur disant qu’il s’agissait de sumac vénéneux.

Savez-vous sur quel avant-bras les enfants ont subi une éruption cutanée ? Croyez-le ou non, mais une éruption a été constatée chez tous les enfants… sur l’avant-bras frotté par la feuille inoffensive !

Encore plus étonnant : le vrai sumac vénéneux, lui, n’a créé de réaction allergique que chez 2 enfants sur 13 !

On retrouve cet effet nocebo dans toutes les études évaluant l’efficacité des médicaments : des patients sous « placebo » se plaignent régulièrement des effets secondaires du médicament… alors qu’ils ne prennent qu’une gélule vide !

Vous voyez peut-être où je veux en venir…

Si votre médecin fait un exposé détaillé de tous les effets indésirables du médicament qu’il vous demande de prendre… il augmente le risque que vous en souffriez !

Vous comprenez pourquoi votre médecin se montre parfois un peu trop « optimiste » sur le traitement qu’il vous prescrit ?

Consciemment ou non, il a tendance à exagérer son efficacité… et à minimiser ses effets secondaires… pour votre bien !

En faisant cela, il augmente réellement vos chances de guérir, et limite les risques d’effet indésirable !

Attention : je reste persuadé que les médecins doivent dire toute la vérité à leurs patients, pour qu’ils puissent choisir leur traitement en connaissance de cause.

Mais vous devez savoir que les médecins ne sont pas dans la meilleure position pour le faire… et c’est pourquoi vous devez toujours vous renseigner par vous-même sur les risques des traitements que vous prenez !

Et c’est la même chose pour les examens médicaux.

Dilemme n° 2 : doit-il prescrire des examens complémentaires ?

Il est toujours tentant pour le patient de réaliser des examens : prise de sang, radio, scanner.

Avoir mal peut être très inquiétant : et si c’était quelque chose de grave ?

Mais c’est très tentant également pour le médecin.

Car en médecine, on ne peut jamais être sûr de rien.

Il y a moins d’une chance sur un million pour qu’un mal de tête « banal » soit le premier signe d’un cancer au cerveau. Et c’est pourquoi on ne vous enverra jamais faire un scanner pour cela.

Mais parfois, ce n’est pas aussi « évident ».

Même si la probabilité qu’on « trouve » quelque chose est minime, votre médecin aura souvent tendance à vous envoyer faire des examens complémentaires… ne serait-ce que pour s’éviter un mauvais procès !

Mais où est le dilemme, me direz-vous ? Quel mal y a-t-il à faire des examens complémentaires ?

La réponse est qu’ils ne sont jamais sans risque.

Voyez plutôt cette histoire racontée par le Dr Christian Lehman dans son livre Patients, si vous saviez

Il reçoit en consultation Joséphine, 73 ans, qui se plaint d’une douleur à la gauche du thorax, qui irradie dans le bras.

Après examen, le Dr Lehman est convaincu à 99,9 % qu’il ne s’agit pas d’un début d’infarctus. Mais le 0,01 % qui reste l’ennuie beaucoup : il ne veut prendre aucun risque… et on le comprend !

Alors il conseille légitimement à Joséphine de se faire hospitaliser.

À son arrivée à l’hôpital, on injecte à Joséphine des anticoagulants, par « précaution »… et suite à une mauvaise réaction, la pauvre se retrouve bientôt en réanimation, sur le billard pendant toute une matinée, après avoir perdu plus d’un litre de sang dans la nuit, via une hémorragie abdominale !

C’est la même chose avec beaucoup de tests ou d’opérations « préventives ».

Prenez les colonoscopies : elles peuvent sauver des vies en détectant un cancer du côlon… mais comme toute opération, elles peuvent aussi se terminer en catastrophe – c’est rare, mais cela arrive.

Faire toujours plus d’examens peut être inutile et dangereux. Mais… vous pouvez aussi passer à côté de quelque chose de grave si vous ne faites pas d’examen.

Vous voyez à quel point la décision du médecin est difficile ?

Et surtout, vous voyez pourquoi il peut être tenté de vous prescrire l’examen de trop ?

Mon épouse Jade a eu récemment une douleur au sein. Son gynécologue l’a envoyé faire une échographie pour s’assurer qu’il n’y avait rien de grave.

Cela peut paraître raisonnable, car l’échographie n’a rien d’invasif. Le problème est qu’après l’échographie, le radiologue n’était pas sûr à 100 % qu’il n’y ait rien… et lui a demandé de faire une mammographie dans la foulée !

Or il est bien établi que les radiations sont potentiellement cancérigènes… c’est donc un test à manier avec précaution, et qu’il ne faut faire qu’en cas de facteur de risque avéré.

Or mon épouse n’avait aucun risque statistique particulier de cancer du sein !

Mais face à un « spécialiste », et sous le coup de l’émotion, il lui était très difficile de dire non !

Voilà pourquoi il faut toujours être préparé.

Un homme ou une femme averti(e) en vaut deux… donc renseignez-vous bien… et n’hésitez pas à vous affirmer !

Dilemme n° 3 : doit-il avoir de la compassion pour ses patients ?

Je voudrais terminer cette lettre par un dilemme un peu particulier… et un poil provocateur.

N’est-il pas évident que le médecin doit toujours être d’une grande humanité avec ses patients ?

Oui, bien sûr. Mais mettez-vous une seconde à la place de votre médecin, surtout s’il est cancérologue, ou neurologue, et qu’il voit chaque jour des cas dramatiques.

Le mot « compassion » vient du latin cum patior, « souffrir avec ». La sympathie (empathie) vient du grec syn pathos – souffrir avec, aussi.

Si un médecin est authentiquement empathique vis-à-vis de tous ses patients… il est condamné à passer ses journées entières à souffrir !

Imaginez les douleurs auxquelles les médecins sont confrontés au quotidien. Imaginez le nombre de patients qu’ils « perdent »… surtout en cancérologie.

S’ils avaient le malheur de développer de profonds sentiments d’empathie pour chacun d’entre eux, leur vie serait un enfer !

Il est logique qu’ils érigent des barrières de protection ! Ou que leur empathie s’émousse avec le temps.

Un peu comme l’inspecteur de police chevronné qui ne s’étonne plus des crimes atroces sur lesquels il doit enquêter.

Attention : je ne suis pas en train d’excuser les attitudes hautaines et inhumaines de certains cancérologues.

Votre médecin vous doit de la bienveillance, toujours.

Mais il ne vous doit pas forcément de la compassion, car tout le monde n’a pas la force d’âme d’une mère Teresa face à la souffrance humaine.

Soyez bienveillant !

Alors je vous invite à être bienveillant vous aussi avec votre médecin.

Gardez toujours en tête qu’il n’est pas un surhomme :

  • L’erreur est humaine : il peut se tromper de diagnostic et de traitement – n’hésitez jamais à demander une « seconde opinion » d’un autre médecin, surtout si une opération chirurgicale est dans la balance ;
  • Il est rare que votre médecin puisse vous accorder le temps dont vous avez vraiment besoin – ce n’est pas de sa faute, à 25 euros la consultation, il ne peut tout simplement pas faire mieux (rappelez-vous qu’un naturopathe demande 60 euros en moyenne !) ;
  • Il n’est pas toujours au courant des dernières études scientifiques – mais avec 10 heures de consultation par jour, il lui est difficile de trouver le temps de « se mettre à jour » ;
  • Il prescrit souvent trop de médicaments… mais n’oubliez pas que beaucoup de malades se plaignent si leur médecin ne leur en donne pas !

Et bien sûr, beaucoup de médecins sont gravement ignorants des méthodes naturelles, corps & esprit, pour guérir en profondeur – mais que voulez-vous, on ne leur en a jamais parlé à la Faculté de Médecine !

Alors n’en voulez pas à votre médecin de ne pas être parfait.

Rappelez-vous que votre santé dépend d’abord de vous-même, de votre mode de vie, mais aussi de vos connaissances.

C’est à vous de compenser les limites inévitables du système médical.

Et pour cela, il n’y a pas 36 solutions : il faut vous informer par vous-même… auprès de sources fiables et sérieuses !

[1] A psychosomatic study of contagious dermatitis, Y. Ikemi et all, Kyushu Journal of Medical Science, 1962

126 Comments

  • H.Rouxin dit :

    Il est effectivement important d’attirer l’attention et de faire réfléchir sur ce sujet. Merci d’avoir donner l’occasion de le faire.
    Si la sympathie (ou la compassion) est de « souffrir avec », l’empathie est plutôt entendre la souffrance (sans la ressentir soi-même), montrer qu’on l’a bien entendue et permettre à la personne en souffrance de l’exprimer pleinement .Cela peut avoir un effet thérapeutique étonnant et parfois suffisant dans un nombre non négligeable de consultations. Mais c’est une compétence parfois difficile à acquérir et à laquelle les études de médecine ne forment pas. Elle prend aussi du temps.

    Mais le médecin (ou tout thérapeute d’ailleurs) n’est pas le grand sorcier qui va, de l’extérieur, guérir par une pilule ou opération miracle. Il n’est qu’une aide, un conseiller et c’est à chacun de prendre les décisions le concernant lui même.
    A chacun de prendre ses responsabilités ! …

  • Darrieux Jacques dit :

    Bonjour M. Bazin,
    Excellente lettre et très bonne analyse du Médecin et du Patient.
    L’Être humain est une « machine » prodigieuse mais ce dernier s’est éloigné de son Concepteur qui lui avait dit « il n’appartient pas à l’homme qui marche de diriger son pas » (Jéremie 10:23). L’humanité se dirige inexorablement vers la fin de ce système à bout de souffle et de tous les côtés: morale, économique politique, social etc… (à cause de son orgueil et de sa cupidité) et fort heureusement le Concepteur de toutes Choses va rétablir son dessin comme précisé dans l’Apocalypse 21: 3 à 8.
    Très Cordialement.
    Jacques

  • orlik valerie dit :

    merci bonne soirée

  • germanangue dit :

    Analyse très pertinente

  • BUSNEL Christine dit :

    Tout à fait d’accord avec votre article, si la critique est facile, l’art est difficile… j’avoue avoir été confrontée à quelques erreurs de diagnostic dont une qui m’a peut-être bien coûté une NOIA, mais ce que vous dites me semble frappé au coin du bon sens… certains médecins sont plus réactifs que d’autres, avec le risque de trop prescrire ; d’autres, a contrario, sont plus posés, plus sereins, avec le risque d’inertie face à certains symptômes qui auraient dû alerter… nous avons tous les défauts de nos qualités et nous devrions toujours avoir cela présent à l’esprit… Je trouve néanmoins que la qualité de certains médecins et spécialistes est en baisse dans cette course perpétuelle contre le temps… ils n’ont plus le temps (ou ne le prennent pas ?) d’écouter vraiment, de se documenter sur ce qui se fait ailleurs, d’une autre manière, certains semblent avoir la science infuse et ne se remettent pas en question… d’autres heureusement se montrent plus ouverts. Là encore question de personnalité. La formation ne fait pas tout… Merci pour vos articles toujours intéressants. Bien cordialement. Christine B

  • Hubert dit :

    Une consultation de nathuropathe
    Dure environ 1h .donc le généraliste a 25h le 1/4h gagné 100€ de l’heure.

  • Jean-Marc LAMADIEU dit :

    Très bonne analyse de l’etat d’esprit des patients

  • Maureen O'Bready dit :

    Intéressant ,j’ai appris un nouveau mot et son sens. Merci pour la leçon d’éthique.

  • JC Decuyper dit :

    Compassion et empathie ne sont pas la même chose.
    La compassion c’est souhaiter la libération de la souffrance et des causes de la souffrance. A utiliser sans modération…

  • Tiertant Jean dit :

    Bonjour
    je suis vos envois régulièrement car intéressé par les médecines douces et ce depuis près de 20ans.
    Médecin d’abord ,généraliste , puis ayant touché à l’homéopathie sans y trouver toutes les solutions, je me suis tourné vers la gériatrie,puis la rééducation .Je garde l’esprit ouvert et curieux .Personne ne peut prétendre détenir toutes les clés.
    je reste cependant très gêné,déstabilisé par la teneur de certains propos que je trouve très tendancieux,pouvant jeter le doute sur l ‘honnêteté ou la qualité des professionnels de la santé dont je fais partie,et qui a ,le plus souvent ,ont à coeur d’apporter les meilleurs soins à leurs patients .Toute critique devrait être constructive,sinon c’est du dénigrement .
    Certes les accidents sous anticoagulants existent mais combien d’embolies pulmonaires évitées,combien d’accidents vasculaires évités chez ces patients arythmiques??Combien de blessés et traumatisés sauvés dans les salles de réa? avez vous toutes les solutions??Je pense que l’on doit rester humble et apporter ,chacun de son coté ,ce que l’on sait faire de mieux :soigner et soulager quand on le peut?!
    .Merci

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